Faut-il nourrir les Oiseaux toute l'année?
 

Cette question à fait l'objet de nombreuses publications, les unes favorables au nourrissage permanent et d'autres plutôt opposées.
La Ligue belge pour la protection des oiseaux  édita en 1998 une brochure didactique qui propose conseils et menus pour le nourrissage hivernal.
En février 1999, la revue AVES  consacrait un article sur le sujet. Les auteurs P. Leprince et A. Demaret  se basant sur des études scientifiques effectuées aux Etats-unis et en Europe concluaient que le nourrissage tout au long de l'année n'était globalement pas négatif.
Les opposants au nourrissage en toutes saisons craignent une dépendance vis à vis de cette nourriture facile, une  alimentation inadaptée pour les oisillons et les risques de transmission de maladies.
Adapter  la  quantité et le type de nourriture distribuée

en fonction de la saison, du climat et des ressources naturelles disponibles constitue la meilleure réponse à cette question .
Le nourrissage d'été avant la maturité des baies et des graines peut être bénéfique pour les oiseaux juvéniles. Il  constitue  un "dépannage " temporaire et ces oiseaux reprendront toujours leur mouvement erratique après quelques jours.
Cet été 2004 en juillet, 49 verdiers juvéniles ont été bagués  à Jupille-sur-Meuse, en août ils étaient tous partis, l'un d'eux a été contrôlé le  2 novembre à Ferrière soit à 30 km.
 Le placement anarchique de nichoirs constitue également un sujet de réflexion, ne  convient t-il pas d'éviter les endroits  plantés essentiellement d' arbustes à baies qui ne fournissent pas de chenilles?
 

Carence d'alimentation

 

 

Les exemples ci-dessous proviennent d'oiseaux  bagués à Jupille-sur-Meuse. En juillet 2004, les mésanges charbonnières attirées par quelques graines de tournesol laissées dans les mangeoires furent très nombreuses ce qui nécessita un approvisionnement important en tournesol  et la distribution d'arachides broyées.

Cette année, les mésanges bleues apparaissent en petit nombre à la mi-août.
Un grosbec adulte mâle se présentait à la mangeoire les 21 et 22 août et le 23, une femelle juvénile  se nourrissait à son tour sur  le site où les photos ci-dessous furent prises.

   





1. Tout observateur, même muni d'une lunette, ne pouvait soupçonner les difficultés déjà supportées par cette mésange charbonnière  âgée d'un mois à peine . Certes, le plumage terne interpelle mais à distance, les effets d'une pénurie alimentaire lors du nourrissage au nid n'apparaissent pas.
Elle fut baguée le 01-08-04, l'observation en main fait apparaître les dégâts au niveau des rectrices.








2. Toutes les plumes comportent un défaut de structure bien connu et appelé "barre de croissance". Les rectrices R1 et R2 affichent une usure anomale à cet âge






3. Très fragilisées, ces plumes se détériorent rapidement. Heureusement, la mésange charbonnière remplace généralement toutes les rectrices avant l'hiver.
Cette mésange charbonnière juvénile ne pesait que 14,6 gr alors que le poids variait entre 16,6 et 18,2 gr pour les 35 autres oiseaux fréquentant le nourrissage en ce mois de juillet.
Il faut espérer qu'elle accèdera régulièrement aux mangeoires où un supplément d'arachides broyées fut déposé, il n'est en effet pas certain qu'elle puisse ouvrir immédiatement les graines de tournesol.
Or le temps presse, elle doit prendre rapidement du poids pour assurer la mue postjuvénile  qui conditionnera sa résistance aux conditions hivernales. La reprise d'une mésange baguée suscitera l'espoir de revoir cet oiseau en bonne santé.
Les troubles de croissance se manifestent chez toutes les espèces,  c'est la nature qui le veut. Nous ne pouvons, qu'après l'envol, nourrir artificiellement les mésanges et quelques autres espèces

 

 

4. Cette autre mésange charbonnière juvénile baguée le 04/08/2004 présente également des barres de croissance aux rectrices. Pour elle, les dégâts se situent au tiers supérieur des plumes ce qui implique une pénurie alimentaire plus tôt après l'éclosion. Cet oiseau pesait 17.6 gr. un poids normal à son âge, la carence fut courte et elle  bénéficiât d'une bonne alimentation les jours suivants.

 

5. Par contre, chez cette mésange charbonnière baguée au printemps,  ce sont  les rémiges qui montrent des  barres de croissance. Or ces plumes  juvéniles fragilisées ne seront renouvelées que l'été. Le rachis s'est cassé emportant les barbes sur 10mm.
Les performances de vol, donc de survie, sont fortement diminuées. Cet oiseau a survécu à l'hiver mais ses capacités de reproduction sont compromises.


Trouble de pigmentation
 

 

Cette mésange charbonnière, observée sur le site dès la mi-octobre souffrait manifestement de troubles de pigmentation. Elle présentait  aussi une difficulté  de mobilité pédestre et se nourrissait exclusivement au sol sur l'aire réservée aux verdiers évitant systématiquement mangeoires, silos et boules de graisse.  Bien que baguée à droite alors que je place la bague à gauche, je n'ai pas jugé utile de la capturer pour vérifier sa provenance pensant à une blessure passagère. Son comportement restât identique en novembre et en décembre. Elle ne quitta jamais le nourrissage.
La pose d'un filet japonais le 14 janvier 2005 permit de la capturer en douceur et toute son infortune apparu. Une malformation de la patte gauche m'avait déjà amené à la baguer le 5-08-2004 à la patte droite comme oiseaux juvénile. La patte gauche  repliée au-delà de la bande ventrale a perdu toute fonction mais une amputation ne se justifie pas, elle ne semble pas souffrir.
Elle vit sur une patte, se pose vraisemblablement plus facilement au sol qu'à la mangeoire mais parvient à ouvrir les graines de tournesol. Vive et alerte en vol, elle semble  en bonne santé avec un poids normal de 18,6 gr.

     
 

Que penser?

Le trouble de pigmentation n'est pas directement lié à l'infirmité mais seulement conséquence. L'oiseau a certainement vécu  sur place depuis le baguage et passait inaperçu avant la mue postjuvénile. Incapable de chasser, elle ne consomme que des aliments végétaux, baies et tournesol ce qui lui suffit au point de vue énergétique mais développe une carence de pigmentation au moment de la mue.
Toutes les autres mésanges bleue et charbonnière juvéniles qui ont été baguées

à la même période présentent un plumage postjuvénile normal ce qui conduit à deux hypothèses :

- la seule alimentation artificielle ne fournit pas les nutriments nécessaires à la mue mais permet à des oiseaux handicapés de survivre.

- les oiseaux qui consomment des graines  en complément d'une autre nourriture naturelle métabolisent l'essentiel des besoins  nécessaires à la mue.  Le nourrissage permanent permet à certains oiseaux de survivre mais empêche la sélection naturelle.  

 

 

Le nourrissage et les saisons

A la fin de l'hiver, les couples de mésanges se forment et prospectent les cavités. Les oiseaux qui nichent pour la première fois, sont-ils capables d'évaluer les ressources naturelles disponibles au printemps ? Les nichoirs artificiels n'ont-ils pas été placés dans des endroits sans chenille ? Que dire du nourrissage à cette époque, utile ou miroir aux alouettes? La prudence préconise de limiter le nourrissage au minimum.

Au printemps en période de nidification, seules les mésanges charbonnières et bleues viendront à la mangeoire  soit pour se nourrir ou en cas de pénurie de proies pour y prendre de la pâtée, un complément adapté à l'élevage des jeunes.
En juillet et août, les observations intéressantes peuvent se multiplier.
En automne et en hiver,  la quantité d'oiseaux  prime avec parfois une espèce peu courante.
Mais n'oublions pas que le plaisir de les observer ou de les photographier ne sont que des objectifs secondaires.

 
 


A gauche, une mésange charbonnière mâle en plumage adulte après une mue postjuvénile ou postnuptiale. La détermination de l'âge "oiseau en main" est possible par l'observation des couvertures primaires. A droite un oiseau en plumage juvénile, le sexe est encore indéterminable.

 


Cet oiseau présente une mue complète des rectrices qui se présente sous forme d'une croissance étagée, le remplacement commence par la paire centrale et se termine par la paire externe. Cette stratégie dans la mue des rectrices dès la fin de l'été renouvelle  donc les plumes juvéniles atteintes par des barres de croissance. Par contre les rémiges ne mueront que l'été suivant.

 
 


Le grosbec juvénile est facile à identifier, le masque est terne et sans bavette, la poitrine et les flancs  sont tachetés. Le sexe peut être déterminé sur le terrain par l'observation des vexilles externes des rémiges internes, gris chez la femelle et pourpres chez le mâle.
 

 


La calotte crânienne du pic épeiche juvénile est rouge. Le plumage juvénile de la nuque ne montre aucune différence entre mâle et femelle, le sexe est donc indéterminable. Chez le mâle adulte la nuque est rouge.
 

 


Le verdier juvénile affiche un plumage terne avec la poitrine et les flancs tachetés. Pour l'oiseau   en main, le sexe de l'oiseau peut être déterminé par l'observation de la partie jaune du vexille externe des rémiges primaires et  l'importance de la partie jaune aux rectrices externes. Cette distinction s'avère délicate sur le terrain.
 

                
 
 
 
 
 


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